Le blogue de Richard Hétu

La musique adoucit les moeurs, dit le proverbe. Et Memory, la plus célèbre chanson de la comédie musicale Cats, était la musique qu’un membre du personnel de la Maison-Blanche avait la responsabilité de faire entendre quand Donald Trump était en proie à une crise de rage, ce qui lui arrivait souvent. Cette chanson, qui est la préférée du 45e président, avait pour effet de le calmer. C’est du moins ce que raconte Stephanie Grisham, ex-directrice des communications de la Maison-Blanche et cheffe de cabinet de la première dame, dans son livre, I’ll Take Your Questions Now, dont le Washington Post et le New York Times ont obtenu des exemplaires, une semaine avant sa sortie.

Je vous ai déjà parlé de ce livre, qui devait contenir des révélations explosives selon la rumeur médiatique. J’ai lu les comptes rendus du Times et du Post (ici et ici) et ma première réaction s’est résumée à un gros bof. Puis j’ai dû m’interroger sur cette réaction en constatant que plusieurs journalistes de Washington faisaient des « oh! » et des « ouah! » en tweetant des détails croustillants du livre qui m’avaient semblé relever du plus pur potinage.

Je vous laisse juger, tout en reconnaissant que je ne rendrai probablement pas justice aux comptes rendus, étant donné ma réaction initiale.

Grisham révèle donc que Melania Trump était vraiment fâchée après les premières révélations concernant la relation de son mari avec l’actrice porno Stormy Daniels et le paiement qui lui a été versé pour la faire taire. « Je ne crois pas à cette merde », a lancé la première dame en parlant des démentis du président et de son avocat personnel, Michael Cohen.

L’autrice révèle que Donald Trump a déclaré à Vladimir Poutine de ne pas se formaliser des reproches publics qu’ils étaient sur le point de lui adresser lors d’un sommet du G20 au Japon avant une rencontre privée. « D’accord, je vais être un peu plus dur avec toi pendant quelques minutes. Mais c’est pour les caméras, et après leur départ, nous parlerons. Tu comprends », a déclaré le président américain à son homologue russe.

Elle dévoile le motif d’une visite mystérieuse de Donald Trump à l’hôpital militaire Walter Reed en 2019 : le président a subi une coloscopie. Une des raisons pour lesquelles il ne voulait pas que ça se sache, en plus de ne pas vouloir céder le pouvoir à Mike Pence pendant la procédure : il ne voulait pas que les comédiens de la télé se moquent de lui. En anglais, c’est encore plus drôle : He did not want to be the butt of a joke.

Grisham ajoute ailleurs qu’Ivanka Trump, surnommée « Princesse » dans son dos, et Jared Kushner se prenaient pour des membres de la royauté américaine. Et elle raconte que les deux ont enfreint le protocole pour s’immiscer dans une rencontre avec la reine Élisabeth lors d’une visite au Royaume-Uni.

Elle donne des exemples du langage et du comportement sexiste de Donald Trump à l’égard des femmes, dont celles qui ont travaillé pour lui. Il est notamment devenu obsédé par une jeune attachée de presse, demandant qu’on l’invite dans sa cabine sur Air Force One pour qu’il puisse admirer son « cul ».

Au bout du compte, le président se montrait détestable envers quasiment tout le monde, selon l’autrice.

« La vérité, c’est que presque tout le monde a fini par faire son temps avec le président », écrit-elle. « Nous étions des bouteilles de lait avec des dates d’expiration. » Et d’ajouter : « J’aurais dû parler plus fort. »

Sur ce, je me fais jouer Memory, car la moutarde me monte au nez.

(Photo PBS)