Le blogue de Richard Hétu

Eric Adams avait promis, une fois élu à la mairie de New York, de relancer la vie nocturne de sa ville, freinée par la pandémie de coronavirus. Plus de huit mois après son entrée en fonction, le démocrate a rempli sa promesse, jusqu’à un certain point. Il sort presque tous les soirs de la semaine. Le hic, c’est qu’il fréquente toujours le même restaurant après ses journées de travail, et qu’il ne semble pas payer pour les repas qu’il consomme dans cet établissement de Manhattan ouvert en novembre dernier par deux repris de justice.

Prouvant que la vie nocturne de la première ministre finlandaise n’est pas la seule à intéresser les médias, le New York Times publie à la une de son édition du jour un article sur celle du maire new-yorkais. Le journal révèle notamment qu’Adams est incapable de fournir un seul reçu prouvant qu’il ne mange pas à l’oeil les assiettes de branzino que lui prépare le chef de l’Osteria La Baia (passons sur le fait que le maire a mené sa campagne en se disant végan). La Commission de la ville sur les conflits d’intérêts avertit les responsables municipaux de n’accepter aucun cadeau offert en raison de leur position.

Un porte-parole d’Adams a répliqué en faisant valoir que les propriétaires du restaurant, les frères jumeaux Robert et Zhan Petrosyants, sont des amis de longue date du maire. Les experts en éthique ne voient pas moins plusieurs problèmes dans la façon dont se déploie cette relation d’amitié. Ils soulignent notamment qu’Adams a vanté le resto des Petrosyants dans les médias à plusieurs reprises, ce qui peut être perçu comme un avantage indu par les concurrents de l’établissement de la 52e Rue ou une forme de paiement pour les repas quasi quotidiens qu’on lui sert à cette enseigne.

Et puis il y a le fait que les Petrosyants ont plaidé coupable en 2013 à des accusations de blanchiment d’argent et qu’ils font aujourd’hui l’objet de diverses poursuites pour factures et impôts impayés. Les New-Yorkais ne devraient-ils pas s’inquiéter des fréquentations du maire avec de tels personnages ? « Le maire Adams ne croit pas qu’il faille juger les gens en se basant sur la pire erreur qu’ils aient faite », a répondu le porte-parole de celui qui a été président de l’arrondissement de Brooklyn, sénateur d’État et capitaine du NYPD avant d’entrer à la mairie.

Cela dit, l’Osteria La Baia n’est pas le seul endroit que le maire de New York aime fréquenter la nuit. Après avoir englouti son branzino en compagnie de ses compagnons de table de la soirée (ou en solo), il se dirige souvent vers le Zero Bond, un club privé de Noho dont les frais d’initiation s’élèvent à 5 000 $, auquel il faut ajouter des frais annuels de 4 000 $, plus le prix des repas et des consommations d’alcool à chaque visite. Selon le Times, le maire de New York fréquente l’endroit sans être invité par un membre et sans payer pour ses repas ou ses consommations.

Il a cependant droit aux plus grands égards, dont l’accès à une pièce privée pour ses rencontres.

Un ami du maire, fondateur de la marque de luxe Billionnaires Row, pense que la ville y gagne au change, car celui qui a été élu grâce aux votes de la classe ouvrière new-yorkaise peut élargir le cercle de ses contacts en se pointant au Zero Bond tard le soir.

« Les joueurs sortent la nuit – les gens d’affaires, les banquiers, les athlètes. Il est logique pour le maire de se frotter aux autres et de nouer des relations. Ces conversations ne se déroulent pas entre 9 et 17 heures », a-t-il dit au Times.

P.S. : Le maire Adams a réitéré ce lundi qu’il n’avait pas l’intention de fournir le moindre reçu pour ses repas à l’Osteria La Baia. « À quel maire avez-vous déjà demandé des reçus pour ses dîners privés ? Vous ne pouvez pas avoir une règle pour Eric et une règle pour tous les autres. Je ne dois à personne un reçu pour un dîner privé. » Il faut dire que cette controverse s’ajoute à plusieurs autres où le maire de New York n’a fait preuve ni de transparence ni de probité.

(Photo QC Images)