Le blogue de Richard Hétu

Ron DeSantis a entamé dimanche soir la tournée médiatique pour promouvoir ses deuxièmes mémoires, The Courage to Be Free, qui sortiront demain et serviront de prélude à sa campagne présidentielle, comme le veut la tradition. Il n’est pas allé en terrain ennemi, accordant une entrevue à l’animateur de Fox News Mark Levin, dont l’émission est intitulée Life, Liberty & Levin. Cette entrevue avait été précédée par la publication d’un extrait du livre par le New York Post et deux fuites parues sur le site de Fox News et dans les pages du Post. L’une des fuites concerne la relation de DeSantis avec Donald Trump (elle est bonne !). Le bouquin de DeSantis, soit dit en passant, est publié par HarpersCollins, qui appartient à Rupert Murdoch, comme Fox News et le New York Post.

DeSantis a démontré dans cette entrevue flatteuse qu’il ne pense pas avec ses pieds. Même s’il est né Jacksonville, en Floride, État qui lui serait virtuellement acquis dans une élection présidentielle, il s’est défini comme un gars du Midwest, région où se jouent les scrutins pour la Maison-Blanche, avec tout ce que cela comporte. « Mon père vient de l’ouest de la Pennsylvanie, ma mère du nord-est de l’Ohio, a-t-il expliqué. C’est le pays de l’acier, c’est le sel de la terre des cols bleus. Et comme vous le savez, Mark, la Floride est très éclectique, les gens viennent de partout. Nous avons une culture, et j’ai grandi dans cette culture, mais ce sont vraiment ces valeurs de la Rust Belt qui m’ont élevé. »

Son livre est-il bon ? La réponse de la critique littéraire du New York Times, Szalai, est un non retentissant. Elle se moque d’abord du titre, une « feinte maladroite d’audace » qui s’accroche « à la sécurité du cliché ». Elle décrit par ailleurs la « froideur sourde » qui se trouve au coeur de ce bouquin où l’auteur ne dévie pas de la vulgate républicaine actuelle et évite de déranger le « dragon Trump ».

La leçon que DeSantis tire du triomphe de son équipe à la Série mondiale des Petites ligues, prestigieux tournoi de baseball pour les 9 à 12 ans, donne une idée du ton et du style littéraire du gouverneur de Floride, qui a étudié l’histoire à Yale et fait son droit à Harvard : « Ce que j’ai compris de cette expérience concernait moins le baseball que la vie. C’était la preuve que le travail acharné peut payer, et qu’il était possible d’atteindre de grands objectifs. » La critique du Times ajoute : « Vous devez imaginer que DeSantis, un double Ivy Leaguer (Yale et Harvard), a mis un peu plus de verve dans ses essais d’admission. »

Et encore : « Le Courage d’être libre est courageusement dépourvu de tout ce qui ressemble à du charisme, ou à un sens de l’humour perceptible. Alors que son premier livre était suffisamment étrange et ésotérique pour avoir été écrit par un être humain, celui-ci se lit comme les mémoires d’un politicien rédigés par ChatGPT. »

« Enlevez les abstractions fumeuses, les clichés réconfortants, et une grande partie de ce que DeSantis décrit dans The Courage to Be Free fait froid dans le dos […] Lire des livres, même mauvais, peut inciter à réfléchir, mais ce que DeSantis semble faire dans The Courage to Be Free, c’est insister pour que les Américains cessent de s’inquiéter et le laissent réfléchir à leur place. Toute critique de ses politiques est rejetée comme étant une absurdité woke inventée par les médias traditionnels (la Fox Corporation et News Corp de Rupert Murdoch, qui possède la maison d’édition de ce livre, ne comptent sans doute pas). »

Fox News – encore Fox News ! – a entamé la semaine du lancement des mémoires de DeSantis avec un sondage qui place Trump en tête dans les intentions de vote chez les républicains :

(Photo AP)