Le blogue de Richard Hétu

Mike Pence s’opposera à l’assignation à comparaître que lui a fait parvenir la semaine dernière le procureur spécial chargé d’enquêter sur les efforts de Donald Trump pour renverser l’élection présidentielle de 2020. Et il s’appuiera sur un argument inhabituel pour se soustraire à son témoignage crucial devant un grand jury, selon le site d’information Politico.

L’ancien vice-président n’invoquera pas le privilège de l’exécutif, dont Donald Trump a tenté en vain de se prévaloir pour empêcher certains anciens membres de la Maison-Blanche de témoigner dans les enquêtes le visant. Il devrait faire valoir que son ancien rôle de président du Sénat – donc de membre du pouvoir législatif – le protège de certaines exigences du ministère de la Justice, en vertu de la section 6 de l’article I de la Constitution, ou plus précisément de ce qu’on appelle la « speech and debate clause ».

Un extrait de la section en question : « En aucun cas autre que ceux de trahison, crime ou atteinte à la paix publique, [les sénateurs et les représentants] ne pourront être arrêtés durant leur participation aux sessions de leur Chambre, ni lorsqu’ils se rendront à une session de cette Chambre ou en reviendront ; ils ne pourront être inquiétés en aucun lieu pour leurs discours ou discussions dans l’une quelconque des Chambres. »

Le sénateur républicain de Caroline du Sud Lindsey Graham avait invoqué en vain cette clause pour se soustraire à une citation à comparaître devant le grand jury spécial du comté de Fulton, en Géorgie. Jamais cette clause n’a été invoquée dans le cadre d’une action contre un vice-président. Le procureur spécial Jack Smith pourrait avoir à débattre cette question devant les tribunaux avant de pouvoir interroger Pence, si jamais il y parvient.

Le témoignage de Pence est essentiel à son enquête. En tant que président du Sénat, l’ancien vice-président a participé à la certification des résultats de l’élection présidentielle de 2020. Auparavant, il avait été la cible de fortes pressions exercées par Trump et ses alliés pour stopper cette certification.

À noter que les juges « textualistes » de la magistrature fédérale, y compris ceux de la Cour suprême, pourraient rejeter l’argument de Pence en faisant valoir que la Constitution précise en noir et blanc que la section 6 de l’article I s’applique seulement aux « sénateurs et représentants » et non au vice-président, et ce, même si ce dernier agit en tant que président du Sénat.

Mais l’important pour Pence est sans doute de montrer qu’il résiste aux efforts du ministère de la Justice et de son procureur spécial pour déterminer si Trump a commis un ou plusieurs crimes.

P.S. : Nous nous engageons dans la deuxième journée de la première campagne de financement de ce blogue en 2023. Un grand merci à tous ceux et celles qui y ont déjà contribué, ainsi qu’aux autres qui le feront d’ici la fin de la journée !