Le blogue de Richard Hétu

Il y a quatre ans, Beto O’Rourke faisait rêver les démocrates du Texas – et ceux d’ailleurs aux États-Unis. Incarnant la jeunesse, l’éloquence et l’intelligence, l’ancien représentant du Texas menait une campagne d’enfer contre le sénateur républicain Ted Cruz. Il devait s’incliner devant ce dernier par seulement 215 000 suffrages, ou 2,6 %, en novembre 2018. Il fallait remonter à 1978 pour trouver une élection sénatoriale plus serrée au Texas. La campagne suivante de Beto avait été beaucoup moins heureuse : avant même le premier scrutin de la course à l’investiture démocrate pour l’élection présidentielle 2020, il lançait l’éponge. Icare s’était brûlé les ailes.

Or, pour utiliser une autre image tirée de la mythologie grecque, Beto O’Rourke renaît de ses cendres, tel le Phénix. Contre toute attente, il mène ces jours-ci une campagne qui fait de nouveaux rêver les démocrates du Texas. Candidat au poste de gouverneur du Lone Star State, il n’est plus qu’à 5 points de pourcentage du détenteur de cette fonction, Greg Abbott, selon un sondage Quinnipiac récent. En décembre dernier, il tirait de l’arrière par 15 points de pourcentage.

La remontée de Beto fait suite à une série d’événements qui ont contribué à ternir l’image d’Abbott et à frustrer les électeurs de son État. Le New York Times résume ces événements dès l’amorce d’un article sur le resserrement de la course au poste de gouverneur du Texas : « L’une des fusillades scolaires les plus meurtrières de l’histoire des États-Unis. Le retour d’une interdiction de l’avortement datant des années 1920. Le pire épisode de décès de migrants de l’histoire récente du pays. Et un réseau électrique, qui est tombé en panne par un froid glacial, et qui est maintenant mis à rude épreuve par une chaleur torride. »

Le Times ajoute plus loin comme motif de grogne chez certains Texans l’adoption en 2021 d’une loi autorisant le port d’armes en public et sans permis. Même dans un État où les armes à feu font partie du quotidien, certains ont trouvé que cette mesure allait trop loin.

Quoi qu’il en soit, Beto O’Rourke n’a rien perdu de l’énergie et la passion qui avaient séduit les démocrates en 2018. Faisant fi de la canicule actuelle, il poursuit ces jours-ci une tournée du Texas d’une durée de 49 jours. Son succès ne se reflète pas seulement dans les sondages. Il a récolté plus de fonds électoraux au cours des quatre derniers mois, soit 27,6 millions de dollars, que son rival républicain.

Ce dernier demeure cependant confiant de l’emporter. Il a plus d’argent en banque qu’O’Rourke, ce qui lui permettra de multiplier les pubs contre ce dernier cet automne. Il se promet notamment de rappeler qu’O’Rourke a déjà promis de confisquer les fusils de style AR-15 et de s’attaquer aux industries fossiles, des positions que rejetteront les Texans selon lui. Et il ne manquera de lier son rival démocrate à Joe Biden, un président très impopulaire au Texas, ainsi qu’à l’inflation, ce fléau qui fait broyer du noir les Texans.

N’empêche : selon un autre sondage récent, mené celui-là par l’Université du Texas à Austin, pas moins de 59 % des électeurs texans estiment que leur État est engagé dans la « mauvaise voie ».

À Beto de les convaincre qu’il y a une autre voie possible.

(Photo AP)