Le blogue de Richard Hétu

Erik Wemple, critique des médias au Washington Post, fait partie de ce que Sarah Palin appelle the lamestream media. Qu’à cela ne tienne : je citerai son opinion concernant le témoignage de l’ancienne colistière de John McCain jeudi dans le procès pour diffamation qu’elle a intenté contre le New York Times devant un tribunal fédéral de New York. La célèbre hockey mom, qui a comparé à la blague la barre des témoins à un « banc de punition », a fait un « bide ».

« Jeudi, la plaignante dans l’affaire Palin contre le New York Times s’est heurtée à son plus grand obstacle : elle-même », a conclu Wemple après avoir donné des exemples du penchant de l’ancienne gouverneure d’Alaska pour les accusations non fondées. Des accusations qui peuvent passer sur Fox News, mais qui sont inacceptables devant un juge, des avocats de la défense et possiblement des jurés.

En gros, Palin accuse le Times d’avoir publié un éditorial le 14 juin 2017 établissant un lien direct entre un graphique publié par son comité d’action politique et une fusillade en Arizona qui avait fait six morts et 15 blessés, dont Gabrielle Giffords, alors représentante démocrate de cet État, le 8 janvier 2011. Je donne plus de détails sur cette affaire dans ce billet. Notons que le Times avait rapidement retiré de son site internet l’allusion erronée.

Depuis la décision de 1964 de la Cour suprême « The New York Times v. Sullivan », le victime présumée de diffamation doit démontrer que l’information publiée est non seulement inexacte et nuisible à sa réputation, mais également que ceux qui l’ont produite l’ont fait avec l’intention réelle de lui nuire.

Or, à la barre des témoins, Palin a déclaré que ce n’était pas la première fois que le Times publiait des mensonges sur son compte. Après l’objection d’un avocat du Times, qui a demandé au juge de rayer l’accusation du procès-verbal, ce dernier a demandé à l’ex-élue de fournir un cas précis.

« Je n’ai pas les articles spécifiques, bien sûr, sous les yeux », a-t-elle répondu, ce qui a de nouveau poussé l’avocat du Times à s’objecter, compte tenu du fait que Palin parlait maintenant de plusieurs articles où le Times aurait menti à son sujet, une allégation sortie de nulle part.

L’objection a été suivie d’un long conciliabule entre les avocats et le juge. Conciliabule à l’issue duquel le juge a déclaré que la question avait été réglée. Et l’avocat de la défense n’a plus touché à ce sujet.

Lors du contre-interrogatoire, Palin a réussi un exploit. Elle a affirmé à la fois qu’elle n’avait pas eu le temps de lire tout ce qui s’était écrit sur elle pendant la campagne présidentielle de 2008 et qu’elle avait trouvé que les médias n’avaient pas assez parlé de sa feuille de route comme gouverneure d’Alaska. Pardon?

Les plaidoiries finales auront lieu ce vendredi. On saura si Palin a vraiment fait un bide à la barre des témoins lorsque le jury rendra son verdict. Verdict qui pourrait avoir des conséquences importantes pour les droits de la presse aux États-Unis.

P.S. : Nous voici arrivés à la dernière journée de la première campagne de financement de ce blogue 2022. L’atteinte de l’objectif est en vue ! Merci à tous ceux et celles qui ont déjà contribué, ainsi qu’aux autres qui le feront aujourd’hui !