Le blogue de Richard Hétu

En mai 2019, les policiers de l’État de la Louisiane ont informé la famille de Ronald Greene que le barbier afro-américain de 49 ans était mort après avoir embouti sa voiture dans un arbre alors qu’il tentait d’échapper à la police après une infraction au code de la route. Deux ans plus tard, à l’approche du premier anniversaire du meurtre de George Floyd, l’Associated Press a obtenu une vidéo montrant un policier donnant des coups de poing au visage à Greene en lui faisant une prise de cou. La vidéo montre un autre policier traînant Greene à plat ventre en le tirant par des menottes attachées autour de ses chevilles. Greene, qui a également les mains menottées derrière le dos, est alors laissé à lui-même pendant neuf minutes, à gémir de douleur et d’inconfort.

«J’espère que ce type n’a pas le foutu sida», dit un policier à un autre pendant qu’ils utilisent un désinfectant pour essuyer le sang qui macule leurs visages et leurs mains.

Pendant deux ans, la police de l’État de la Louisiane a refusé de rendre publiques les vidéos réalisées par les caméras corporelles des policiers impliqués dans l’arrestation, policiers qui sont tous blancs. Après les images exclusives de l’AP, elle a fini par publié à son tour 46 minutes de vidéos. Celles-ci montrent notamment que les policiers ont rapidement utilisé leurs pistolets Taser pour faire sortir Greene de sa voiture. Pendant ce temps, l’homme s’excuse d’avoir tenté d’échapper à la poursuite des policiers sur une petite route de la Louisiane peu avant minuit 10 mai 2019.

«Je suis votre frère! J’ai peur! J’ai peur!», s’écrie-t-il pendant qu’il reçoit les décharges du pistolet électrique. «Je suis désolé!», ajoute-t-il.

Greene était inconscient et étendu sur une civière lorsqu’il a quitté les lieux de son arrestation. Le rapport d’autopsie, longtemps tenu secret et récemment rendu public, mentionne les blessures à la tête de Greene et la façon dont il était attaché comme facteurs de sa mort. Le document note également qu’il avait des niveaux élevés de cocaïne et d’alcool dans son système, ainsi qu’une fracture du sternum et une déchirure de l’aorte.

«Je l’ai tabassé sans merci», dit un des policiers à un collègue, selon un des documents diffusés par l’AP. «Je lui fait une prise du cou et tout le reste pour essayer de le maîtriser. Il crachait du sang partout, et tout d’un coup il est devenu mou.»

Ce policier, Chris Hollingsworth, est mort dans un accident de la route survenu quelques heures après avoir appris qu’il serait viré pour cette affaire. Dakota DeMoss, un autre policier impliqué dans l’arrestation, a été arrêté et accusé d’usage abusif de la force dans une autre affaire. Un autre policier, Kory York, a été suspendu 50 heures sans paie pour avoir traîné Greene en le tirant par les menottes attachées à ses chevilles.

La famille de Greene poursuit la police de l’État de la Louisiane pour mort injustifiée. Le département de la Justice a lancé une enquête pour déterminer si les droits civiques de Greene avait été bafoués.

Les experts de l’usage de la force ne comprennent pas pourquoi les policiers ont laissé Greene, un homme corpulent, étendu sur le ventre pendant neuf minutes avec les mains menottées derrière le dos, sans lui apporter le moindre soin. Neuf minutes.

Au fait, le devant de la voiture de Greene n’était pas endommagé et son coussin gonflable ne s’était pas déployé.

(Photos AP)