Le blogue de Richard Hétu

L'Amérique dans tous ses états

Les élections de mardi soir ont un air de débâcle pour les républicains de l’État de Virginie: ils ont perdu le contrôle des deux chambres de l’Assemblée générale de cet État qui, avec le Maryland, encercle Washington DC.

Au Sénat (la chambre haute), les démocrates sont passés de 19 à 21 sièges; à la Chambre des délégués (la chambre basse) de 49 à 54 sièges. C’est la première fois depuis 1996 qu’ils contrôlent les deux chambres, alors que le gouverneur et son lieutenant sont tous les deux démocrates.

Que comprendre, au-delà d’un référendum sur Trump, comme l’expliquait Richard?

Déjà, le taux de participation semble avoir explosé dans toutes les circonscriptions. Un ami politologue me faisait remarquer que les abstentionnistes ont tendance à voter démocrate. Visiblement, on a su les mobiliser.

Deuxièmement, il faut voir que la Virginie est un État fluctuant. En 2016, aux élections présidentielles, les électeurs avaient voté à 49,73% pour Clinton et 44,41% pour Trump.

C’est un État où les politiques ont toujours été fermement débattues avec moins d’idéologie qu’ailleurs. Durant les élections précédentes, les questions d’infrastructure et de taxation ont été cruciales dans le vote des électeurs. Cette année, les questions d’une hausse du salaire minimum, des réformes de justice et de l’adoption d’un plan d’assurance-santé au niveau de l’État étaient les principales politiques débattues.

Mais ces éléments ont rapidement été enterrés par la cacophonie d’une campagne extrêmement agressive. Les publicités à la télé donnaient le ton. Côté démocrate, on tentait de présenter l’adversaire comme des pro-Trump enragés. Côté républicain, on voulait présenter les démocrates comme des extrémistes de gauche. Très peu de contenu, mais beaucoup d’attaques personnelles. Étonnamment, presque toutes les publicités républicaines ne mentionnaient pas leur allégeance au parti.

Malgré tout, la Virginie a servi de laboratoire pour le groupe de pression sur le contrôle des armes Everytown for Gun Safety. L’ancien maire de New York Michael Bloomberg y a injecté 2,5 millions de dollars pour soutenir les démocrates, et ce dans un bastion du principal lobby pro-armes, la National Rifle Association (NRA). Son succès risque de donner le ton dans plusieurs États clés pour les élections de 2020, alors que plusieurs analystes croient que l’inaction des républicains sur le sujet leur a nuit.

Troisièmement, au-delà de cette victoire, pas de coups d’éclats du côté des candidats. La vague bleue virginienne n’a pas permis à une égérie de se démarquer.

La victoire la plus intéressante est celle de Juli Briskman pour un poste de superviseur dans le comté de Loudoun. La démocrate avait fait les manchettes après avoir fait un doigt d’honneur, alors qu’elle roulait en vélo, au passage du cortège présidentiel en 2017. Ce geste lui avait fait perdre son boulot. Le plus intéressant: Trump a un club de golf dans le même comté.

Au-delà de cette victoire, peu de résultats exaltants. Schuyler VanValkenburg, délégué du district 72, un des sièges que les républicains espéraient gagner en présentant une candidate modérée, a été réélu. Scénario pareil pour les autres circonscriptions. L’Assemblée générale comptera sa première déléguée de confession musulmane, Ghazala Hashmi.

(Photos AFP/Getty Images)

22 réflexions sur “Élections en Virginie : le raz-de-marée démocrate en 3 points

  1. ghislain1957 dit :

    « Très peu de contenu, mais beaucoup d’attaques personnelles. »

    Les publicités des ripoux-blicains sont à l’image du gros 🤡 clown orangé, peu de contenu et des attaques personnelles vicieuses.

  2. ProMap dit :

    Il y a aussi cette question du gerymandering mentionnée par M. Hétu qui s’ajoute au billet de M. Boisvert, dont l’augmentation du nombre d’électeurs votant. Un retour à plus de normalité de la carte électorale (pour la Virginie en tout cas) couplé à un message politique national plus modéré axé sur les thèmes porteurs de 2018 et un effort marqué pour faire sortir le vote doit influencer le plan démocrate pour 2020. C’est assez clair

  3. Danielle Vallée dit :

    Entendu à la TV.: Washington D.C. est très démocrate. Et comme toutes les grandes villes les jeunes familles s’installent de plus en plus dans les banlieues, et la Virginie est considérée comme une de ces banlieues.
    Donc démographie changeante.
    Et plusieurs de ces gens travaillant à Washington, donc plutôt politisés.

    1. ProMap dit :

      Danielle Vallée – Pour renchérir, Alexandria par exemple dispose d’un lien par métro avec Washington. Ça aide.

  4. treblig dit :

    Faire sortir le vote.

    La malédiction des démocrates serait-elle enfin rompue ? Trop tôt pour l’affirmer.

    Il est plus difficile de rejoindre une clientèle hétérogène alors que les républicains sont les champions côté discipline de vote.

  5. chicpourtout dit :

    Parenthèse: j’espère que madame Briskman a eu accès à des recours pour contester ce congédiement vraiment abusif à l’époque…

    1. Achalante dit :

      De ce que j’ai compris, il ne s’agissait pas d’un congédiement, mais on l’a forcée à démissionner. Techniquement pas la même chose, mais au bout du compte, ça revient pas mal au même…

    2. karma278 dit :

      En effet, elle a été congédiée pour avoir exercé son droit à la liberté d’expression.
      Elle n’était pas au travail. Ça semble abusif à première vue.

      HOWEVER, en tant que superviseure, rôle dont je ne connais rien, pourrai-elle, par exemple, suggérer des inspections supplémentaires au terrain de Tiny❓❓❓ 🤣🤣🤣

      Revanche, ça sent, oui oui…🧑‍🚀

      1. Haïku dit :

        Diantre de bonne idée !👌

  6. slyderv dit :

    La meilleure personne pour faire sortir le vote démocrate s’appelle Donald Trump. T’as qu’à le laisser aller, c’est naturel chez lui d’insulter tout le monde. Et les gens mous, s’ils ne savent pas pour qui ils veulent voter, savent néanmoins qui ils ne veulent pas.

  7. Richard Desrochers dit :

    Un commentateur sur CNN à la suite de ces élections a fait une remarque que j’ai trouvé intéressante malgré sa portée limitée. Les familles de ces banlieues seraient sensibles au bullying qui se répand dans les écoles en l’attribuant à la normalisation de ce comportement dont ils tiennent DT responsable. Ce n’est évidemment pas une explication, toutefois on voit bien que beaucoup se rendent compte que ce président est délétère et ne constitue vraiment pas un modèle pour les plus jeunes.

    1. danielm dit :

      Vous avez raison en mentionnant les abus de langage, son irrespect virulent de ses opposants et la nature confuse du discours de Donald Trump comme élément contribuant à sa perte graduelle de crédibilité auprès de plusieurs américains.
      Mais je demeure prudent car pour l’emporter, les démocrates devront compter sur un fort appui électoral, homogène et effectif. Tout cela reste à démontrer.

      1. karma278 dit :

        J’ajouterais tous les qualificatifs dégradants dont ils affublent systématiquement leurs adversaires.

        Trump a commencé, aujourd’hui c’est devenu la norme dans tous les états. Plus personne ne s gêne pour insulter un adversaire, et, très à la mode, le traiter de socialiste, de radical, d’extrémiste de la gauche, et le cétéra, et le cétéra, et le cétéra. 😜😜😜

      2. chicpourtout dit :

        En effet, c’est du jamais vu… et j’oserai dire que c’est parfois assez répulsif comme effet… cela deviens même hargneux par moments.
        Cette perte de civilité est bien présente et prend à l’occasion des proportions contagieuses.
        Il y a un tel contraste entre la période de Barack et maintenant, c’est inoui! Une telle perte d’élégance, de qualité, de respect protocolaire, de décence entre les parties adverses, etc. La vulgarité des propos est désormais au rdv…

    2. onbo dit :

      Cette explication a beaucoup de sens, spécialement pour 2020.!

  8. gl000001 dit :

     » presque toutes les publicités républicaines ne mentionnaient pas leur allégeance au parti. »
    Pas de « Payé par Moron in chief et j’Approuve ce message » ? Et c’est légal ?

    1. ProMap dit :

      gl000001 – Bonne question? Si tu ne t’affiches pas sous l’un des deux partis, cela signifie-t-il que tu t’affiche comme indépendant?

      Cela veut-il dire aussi que le parti ou le président sortant est toxique pour un républicain? Technique reps classique, on en cache le plus possible pour mieux fourrer l’électeur?

    2. loup2 dit :

      Lors des élections fédérale au Canada la bande à Sheer avait la même tactique (ou presque).
      Une voix «off» avec des photos de Justin. À la toute fin de la pub tu pouvais voir en bas de l’écran de la télé en lettre très «minuscule» qu’il sagissait d’un message des con servateurs.

      PS. Vous avez vu infoman jeudi dernier ? Jean-René Dufort a été porter des fleurs à mon ancienne députée Ruth Ellen Brosseau directement chez-elle à Yamachiche. Elle va revenir Ruth je suis certain.

  9. Gilles Morissette dit :

    La campagne électiorale a été à l’image de ce que sera la prochaine présidentielle. Une campagne sale, vicieuse où tous les coups seront permis.

    Les Démocrates devront accepter le fait qu’ils devront peut-être accepter de se salir les mains. »No more Mr. Nice Guy » devront-ils se dire à chaque jour. Oeil pour Oeil, Dent pour Dent.Pas nécessairement le « lançage de bouette » mais le « lançage de bouette » si nécessaire. Tant pis pour les coeurs sensibles.

    C’est de cette façon qu’on peut espérer gagner une élection à l’ère du Gros Taré.

    Côté positif, les Démocrates devront proposer des mesures concrètes et réalistes sur des thèmes plus porteurs comme la santé, l’éducation, l’environnement et le contrôle des armes à feu tout en mettant en relief le fait que les Répuiblicainsn’ont rien fait pour améliorer le sort des Américains dans ces dossiers.

    Ils devront recentrer leur discours s’ils veulent s’attirer les faveurs des électeurs modérés quitte à tasser les éléments plus « À Gauche ». Ce sera le prix à payer s’ls veulent espérer gagner.

  10. FlorentNaldeau dit :

    DT s’était lui-même mis au centre de ces scrutins et les avaient présentés comme des référendums sur sa présidence.

    Les politiciens devraient être très prudents et y réfléchir à trois fois avant de ramener un scrutin à une seule question ou à leur personne. Non seulement cela sur-simplifie un processus collectif complexe qui se compose de milliers ou de millions de décisions individuelles, mais ils peuvent se trouver piégés dans leurs contradictions si le résultat ne correspond pas à leurs attentes et qu’il doivent alors expliquer que ce n’était pas vraiment un référendum. Notre premier ministre du Québec devrait appliquer cette sage leçon à l’élection partielle qu’il déclaré être un référendum sur sa maladroite loi sur la laïcité; il pourrait peut-être s’en mordre les doigts.

  11. Achalante dit :

    Un autre article indique que le gain des démocrates en Virginie pourrait être redevable en parti au « Equality Right Act », la loi sur l’égalité des droits. Présentement ratifiée par 37 états (dont le Nevada et l’Illinois, dans les cinq dernières années). Le chiffre de 38 marque la barre des trois quarts de États requis pour en faire un amendement à la constitution (je traduis librement, le lien suit). Ce fut donc l’un des enjeux majeurs supportés par les démocrates lors de cette élection. Et ce devrait être l’une de leurs premières réalisations. Bonne chance à tous!

    https://www.huffingtonpost.ca/entry/virginia-equal-rights-amendment-women_n_5dc2f5c4e4b0f5dcf8fef195?ri18n=true

  12. citoyen dit :

    il y a peut être lieu de se demander qu’il n’y a plus de républicains ni de démocrates et qu’il y a un 20% de la population qui change les données des élections en fonction des humours et des préférences.

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