Le blogue de Richard Hétu

Après la guerre de Sécession jusqu’à l’adoption de la Loi sur le droit de vote de 1965, l’accès des Noirs aux bureaux de scrutin est l’avancée que les suprémacistes et les ségrégationnistes blancs, avec ou sans leurs cagoules et robes du Ku Klux Klan, ont combattue avec le plus de force, allant jusqu’à utiliser la terreur pour y parvenir. C’est en partie à cause de cette histoire qu’un politicien peut difficilement survivre en 2019 à la publication d’une photo qui l’associe au KKK et au blackface, vestige d’un racisme qui était aussi condamnable en 1984 qu’aujourd’hui. Et c’est d’autant plus vrai pour un politicien qui doit son élection en grande partie à la mobilisation des Noirs. Des Noirs qui ne peuvent voir dans cette photo que le symbole d’un effort, conscient ou non, de déshumanisation.

Ce qui ne veut pas dire que Ralph Northam n’est pas l’objet d’un procès absurde, jusqu’à un certain point. Surtout lorsqu’on voit ce que certains politiciens républicains peuvent se permettre, à visage découvert, sans en subir les conséquences. Je ne pense pas seulement au président actuel, qui trouve qu’il y a des gens bien autant chez les militants anti-fascistes que chez les néo-nazis. Je pense aussi à Mitch McConnell, qui a qualifié cette semaine de «coup de force» un projet de loi des démocrates de la Chambre des représentants pour faire de la journée du scrutin présidentiel un congé férié fédéral. L’objectif du texte? Augmenter la participation électorale.

Un «coup de force», vouloir permettre aux citoyens qui sont souvent les plus vulnérables d’aller voter? Des citoyens qui préfèrent souvent ne pas voter plutôt que de perdre une partie de leur salaire ou même leur emploi parce qu’ils doivent faire la file pendant des heures devant un des rares bureaux de vote ouverts dans leurs quartiers ou leurs patelins défavorisés?

La photo qui coiffe ce billet ne date évidemment pas d’hier. Elle a été prise au début des années 1990 à Louisville, au Kentucky, où le futur chef de la majorité au Sénat a reçu devant un drapeau confédéré un honneur décerné par les Sons of Confederate Veterans, organisation créée par les descendants des soldats qui se sont «courageusement», «noblement», «dignement» battus pour perpétuer l’esclavagisme.

Et Mitch McConnell n’est pas moins fier aujourd’hui de qualifier de «coup de force» un projet de loi pour permettre à un plus grand nombre d’électeurs, dont plusieurs sont issues des minorités, de voter.